Hubert Joly
Il y a de quoi être écœuré par la décision des membres de la commission des finances de proposer à l’Assemblée nationale une libéralisation des achats de tabac aux frontières de la France. Les quantités autorisées seraient donc multipliées par dix.
Comment ne voit-on pas derrière ce soit-disant alignement sur les exigences de la Cour de justice européenne un alignement pur et simple sur les pressions et les intérêts du lobby anglosaxon des cigarettiers ?
Pourtant tout esprit raisonnable ne voit que de graves inconvénients à une telle décision.
En premier lieu, c’est attaquer directement la politique de santé publique. Il va falloir accepter une augmentation du nombre des morts par tabagisme mais en plus payer pour de nouveaux cancers.
Ensuite, l’Etat va perdre une proportion non négligeable de recettes puisque beaucoup iront acheter les cigarettes hors des frontières. L’Etat a-t-il trop d’argent ?
Les buralistes ne manqueront pas non plus de protester une fois de plus contre une atteinte à leurs intérêts et l’Etat toujours lâche et faible se tordra le nez pour leur trouver des compensations sur le dos des contribuables.
Cela va évidemment donner naissance à un trafic sordide que les douaniers ne pourront jamais contrôler car il se passera à l’intérieur de nos frontières.
Pour finir, un dommage supplémentaire va être causé aux institutions européennes qui n’ont déjà pas la cote aux yeux de beaucoup de français. De quoi vous dégoûter de soutenir la construction européenne si c’est au prix – excusez le mot mais il s’impose - de la « connerie » des dirigeants européens qui ne brillent déjà pas par leur politique de l’énergie ou leur politique de l’immigration. Veut-on faire casser l’Europe ? Veut-on que nous la cassions ?
Solon avait bien raison de dire aux Athéniens, en pensant à nos futurs députés : « Quand vous êtes seuls, vous êtes rusés comme des renards. Quand vous êtes en groupe, vous êtes bêtes comme des oies. »
Quand une politique est dangereuse et délétère, quand elle nuit directement aux intérêts des citoyens, il faut avoir le courage de la refuser. Il y a de quoi devenir vraiment enragé.
Arrêtez le massacre par pitié.
Hubert JOLY